Juan Spray, pochoiriste urbain

Enfant dans les années 80, Juan découvre, comme beaucoup de cette génération, le mouvement Hip-Hop en provenance des Etats-Unis. « J’ai grandi avec toutes les disciplines du Hip-Hop, la musique bien sûr mais aussi le graffiti et la danse. Depuis cette époque, j’ai toujours eu un lien avec la culture urbaine. » Très tôt Juan dessine sans devenir pour autant l’ado graffeur caricatural. À la place, il découvre l’infographie et Photoshop en autodidacte et en fera son métier : graphiste freelance. Il réalise en parallèle des pochettes d’albums de rap et développe aussi une activité de beatmaker. Il choisira de ne pas devenir un professionnel du rap, par goût d’indépendance. La révélation vient plus tard. « En 2010, je découvre Banksy et ses pochoirs. J’aime sa manière d'interagir avec l’espace urbain. J’aime aussi son regard. Ses oeuvres sont pleines d’humour et de poésie. C’est comme une évidence, je me lance moi aussi. » Pour ses premières performances à Amiens et Paris, il détourne des héros de la pop culture. Comme avec ces autocollants placés sur un feu tricolore de la rue des Otages à Amiens. Sa première oeuvre en 2011.

La passion grandit et en 2017, Juan décide de se lancer à temps plein dans son activité de street artiste. « Je me suis donné 5 ans pour réussir dans l’art urbain. » Deux ans plus tard, il crée son propre personnage : Sprayitos, une sorte de lutin avec un couvre-chef évoquant les bombes de peintures. Nourri aux dessins animés du club Dorothée, Juan vient de créer une sorte de schtroumpf urbain flashy. Il le fait alors voyager sur les murs des friches de la ville ou pour des commandes, comme dans son ancienne école maternelle. Avec l’auteur Arnaud Randon, il regroupe ses personnages dans un conte pour enfants sur l’art urbain, en autoédition. Un second tome ainsi qu’une série de dessins animés sont en préparation pour 2023.

« Je n’ai pas de revendication avec ce personnage. C’est une démarche très simple basée sur le sourire, la tendresse, l’innocence. » Juan s’inscrit dans les origines de la culture urbaine. « Le Hip-Hop des débuts c’est la volonté de sortir de la guerre des gangs et de la ségrégation urbaine. Les créateurs du mouvement voulaient véhiculer des messages positifs. C’est le Peace, Unity, Love, and Having Fun d’Afrika Bambaataa et de la Zulu Nation. »

Pour Juan, l’art dans la rue c’est à la fois un espace de liberté et une action d’embellissement urbain. Un art éminemment populaire qui incite à renouveler son regard sur des quartiers populaires. « Je ne fais rien de mal, au contraire. J’apporte de la couleur là où il en manque, je change le regard sur un pan de mur à l’abandon, j’échange avec les gens qui s’intéressent à mes créations. »

La galerie est une opportunité que Juan et Kwes saisissent un peu par hasard. À la recherche d’un nouvel atelier, on leur propose ce local rue des Majots au bord du quartier Saint-Leu. La disposition des lieux laisse un grand espace pour accrocher des oeuvres d’artistes urbains. Le projet de galerie est né.

Rêve Lucide a ouvert ses portes en septembre 2022. « L’art urbain c’est avant tout de l’art. Le lien avec une galerie est donc plutôt naturel. Nous mettons en place une programmation pour faire découvrir des artistes locaux et internationaux. Il y aura aussi des ateliers sur les techniques, des rencontres, des parcours de découverte dans les rues de la ville… » 

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Cinq ans après avoir fait le pari de réussir comme artiste de street art, Juan se lance un autre défi : contribuer à faire rayonner Amiens et les artistes amiénois sur la scène mondiale de l’art urbain.

Les contes de Spraylove Island
1er tome disponible dans les librairies amiénoises

Galerie Rêve Lucide
18 Rue des Majots, 80000 Amiens
Entrée libre, du mercredi au dimanche,
de 11h à 19h

Rédaction : Vincent Trelcat
Photos : Léandre Leber