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Marinette Pichon, star internationale d’un film “local”

Le 16/02/2022 0

Dans Culture

Les Hauts-de-France - la Somme en premier lieu - accueillent le tournage de “Marinette”, premier biopic sur une sportive française, Marinette Pichon, star du football féminin des années 1990 et 2000. La réalisatrice, Virginie Verrier, met aussi en avant sa région natale en faisant appel à CIT-Dessaint pour les tenues de foot.

“Je voulais tourner dans les Hauts-de-France, j’ai grandi à Compiègne, donc j’ai des attaches dans la région. Mon premier film (NDLR : À 2 heures de Paris, sorti en 2018) a été tourné en baie de Somme.” Les racines, voilà donc quelque chose qui compte pour Virginie Verrier. Et pourquoi se compliquer la vie ? “Souvent les réalisateurs sont attachés aux lieux de leur enfance. Si j’avais voulu tourner dans le Sud, je serais partie d’une page blanche.” Au lieu d’un dépaysement, cette ancienne spécialiste du cross-country, qui a derrière elle “dix ans d’athlétisme”, a opté pour un cadre plus familier : “entre Abbeville et l’école de Cambron, on tourne plus de la moitié du film. Sinon, on passe aussi deux jours à Albert, une semaine à Montdidier, au centre des 3 Doms et une semaine au Touquet.” 

À Abbeville, Virginie Verrier apprécie d’avoir pu tourner dans des décors naturels, essentiellement au stade de Rouvroy car “on cherchait un stade qui n’avait pas bougé depuis trente ou quarante ans.” Parce qu’à Abbeville sont tournées les scènes des années 1980-1990, soit l’enfance et l’adolescence de Marinette Pichon, née en 1975. Ses premiers pas de footballeuse, celle qui totalise 112 sélections et 81 buts en équipe de France, les a effectués dans des équipes de garçons, car le foot féminin en était à ses balbutiements. 

Pour cela, elle a bénéficié jusqu’à 15-16 ans d’une dérogation de la Fédération française de football, explique Virginie Verrier “comme il n’y avait pas d’équipe féminine à moins de 100 km de chez elle, en Champagne. Après, il y a eu un moment de flottement, elle ne savait plus trop où aller et puis elle rejoint l’équipe féminine de St Memmie, dans la Marne”, où elle va rester dix ans et se révéler. “C’est en découvrant le livre de Marinette Pichon (NDLR : Ne jamais rien lâcher, chez First Editions) que j’ai eu envie de raconter son histoire. Je me suis dit qu’il y avait des sujets porteurs et j’avais envie de faire un biopic de sportive.” 

Le rêve américain de la petite Frenchie, qui va se réaliser quand elle signe à Philadelphie en 2002 puis à New Jersey en 2004, n’est pas occulté, bien au contraire, même si le tournage se déroule de ce côté-ci de l’Atlantique : “au Touquet, sont tournées les scènes dans les habitations américaines et des scènes de bar. Car on a trouvé des grandes maisons style anglo-normand qui rappellent celles de la côte Est américaine” indique une cinéaste tout heureuse de profiter à fond des décors naturels des Hauts-de-France.

“On a fini un jeu de maillots, on en commence un autre…” Philippe Dessaint

Et qui dit foot, dit tenues complètes pour Garance Marillier, la jeune comédienne nommée aux César 2018 pour son rôle dans “Grave”, de Julia Ducournau, qui incarne Marinette Pichon. Il faut donc des jeux de maillots aux couleurs des différents clubs où a évolué l’ex-attaquante des Bleues. Même chose pour équiper les acteurs confirmés à l’affiche que sont Sylvie Testud et Fred Testot, ainsi que les autres comédiennes et les figurantes qui jouent les coéquipières : “l’appel pour recruter des figurants a super bien marché ! On a eu beaucoup de joueuses de foot de la région, plus de 200 filles sur tout le film. Je voulais que ça joue vraiment, que ça ne fasse pas semblant de pousser le ballon” précise, avec le souci du détail, Virginie Verrier.

“En fin d’année dernière, une costumière est venue me voir, confie Philippe Dessaint, directeur de l’entreprise de confection textile CIT-Dessaint, à Amiens. Elle m’a dit : une amie va avoir besoin de votre savoir-faire pour un tournage…” La suite, l’expérimenté patron ne s’attendait pas à ce qu’elle soit aussi chronophage ! “Je n’ai jamais vu ça ! C’est un dossier très lourd. On a fini un jeu de maillots, on en commence un autre. Soit dix à quinze jeux de maillots, plus les survêtements. Et des personnalisations.” 

 

Au départ, il pensait se servir de tissus des années 1980 et 1990 qui lui restaient en stock, avant de vite réaliser que c’était “plus pratique de se servir des techniques actuelles. Et personne ne verra la différence à l’image.”  Quand on lui apprend que la réalisatrice a tenu à faire travailler une entreprise locale, Philippe Dessaint se dit sincèrement “honoré.” 

La diversification ne date pas d’hier

Si à Amiens CIT-Dessaint reste associée au sport, cela fait longtemps que l’entreprise créée en 1911 par le grand-père de Philippe Dessaint, se diversifie. “On a deux jambes pour tenir debout ! Il y a une corde qui s’use, qui va casser, donc il faut toujours avoir quelque chose sur le feu, un nouveau produit, une nouvelle porte. Et sans cesse de nouveaux savoir-faire, compléter sa gamme, avancer. Ce n’est pas pour rien qu’on est une entreprise centenaire ! Je ne fais pas le produit de mon grand-père. Mon père ne faisait pas le produit de son père. Et je ne fais plus du tout les produits de mon père. C’est parce qu’on a tout le temps su évoluer qu’aujourd’hui on existe encore” assure-t’il.

Comme le sport représente encore quand même “les deux tiers de notre chiffre d’affaires”, cette commande pour le cinéma est un joli clin d'œil puisqu’elle permet d’associer le sport, avec ces tenues de foot, à la partie “spectacles” de l’activité de l’entreprise qui a quitté la rue Jean-Moulin il y a trois ans pour les anciens locaux plus vastes de Cosserat, rue Maberly. “Le monde du spectacle a plus souffert de la Covid que le sport” déplore Philippe Dessaint déjà tourné vers la prochaine (r)évolution : “tous les trois ans, on change de métier ! Je constate ce rythme triennal depuis trente ans : tous les trois ans, il se passe quelque chose de fondamental, en production, en déménagement, en tissus, en marchés, en nouvelles machines.” Mais de tout cela, le grand public comme les spectateurs qui découvriront en 2023 “Marinette” au cinéma avec ses maillots de foot confectionnés par CIT-Dessaint, n’ont pas conscience. C’est un travail de l’ombre qui se retrouve sous les projecteurs !

Reportage Léandre Leber
Photos Dicilà Kevin Devigne et Léandre Leber
Rédaction Vincent Delorme

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